Mauss - Aux dernières nouvelles (2008)

"Je Recherche", premier single décliné au masculin/féminin, nous ouvre les portes du nouvel album de Mauss. À l’écoute de ce titre, un mid-tempo aux effets immédiats garantis, on se dit que l’ami Mauss, prénom Fabrice pour l’état civil, a parcouru un sacré bout de chemin depuis la sortie de sa paire de démos, à l’aube du nouveau millénaire. Deux essais essentiellement régionaux, certes, mais qui ont eu le mérite de dessiner la personnalité d’un artiste bouillonnant d’idées. Déjà à cette époque, certains tentèrent de capturer Fabrice pour le ranger trop hâtivement dans les bacs du rock français. Peine perdue. L’homme n’a que faire des raccourcis stylistiques et s’échappe, non sans avoir passé avec succès la dure épreuve du jugement du public lyonnais, pourtant réputé pour ne pas être un tendre. La grande aventure peut enfin commencer. Son année passée aux Etats-Unis où il se retrouva derrière les fûts d’une batterie, les sacrifices qu’il a dû faire pour embrasser une carrière d’artiste où les doutes qui ont pu un instant embrumer son esprit, très vite chassés par une passion sans faille, sont rangés au rayon des souvenirs. Mauss se nourrit du passé pour mieux construire son avenir et vivre à fond l’instant présent.
Son premier album, L’Année Du Chien, sorti en octobre 2005, Fabrice l’a désiré comme jamais après avoir goûté pêle-mêle pendant quatre ans, aux joies du R.M.I., aux séances de studios louées la nuit pour restriction budgétaire ou aux saveurs inégalées des sandwiches triangles que l’on peut trouver à profusion dans les stations services de notre beau pays. Une bien jolie carte postale écrite dans les murs du studio ICP, à Bruxelles, pour se faire connaître. Une bonne excuse également pour aller rencontrer un public aux quatre coins de l’Hexagone, aussi bien dans des clubs d’une poignée de centaines de personnes qu’au Stade Vélodrome de Marseille, devant 60000 spectateurs. Beau parcours, surtout pour un fan de foot, même lyonnais. Mais le commerce a ses propres lois, impitoyables. Certains auraient sans doute abdiqué. Pas Fabrice. Une déception, certes, pas un échec, loin de là. Pour preuve, les nouveaux morceaux qui ont germé dans la tête de notre homme pour aller fleurir son second album, non sans avoir d’abord travaillé les moutures au studio de l’Hacienda et élagué le tout une nouvelle fois à l’ICP, grâce aux mains expertes de Djoum (Superbus, Indochine, Alain Bashung…). Dans l’univers du ballon comme dans celui de la musique, on ne change pas une équipe qui gagne. Les plus grands journalistes sportifs l’ont écrit. Mauss a respecté cet adage. Humblement, il s’est entouré des mêmes personnes présentes sur son premier opus, quant aux arrangements et aux instruments, pour construire patiemment une nouvelle livraison digne de ce nom. Si vous pensez qu’une seule écoute vous donnera les clefs pour capturer l’univers de l’intéressé, vous risquez fort d’aller vers de grandes désillusions. Aux Dernières Nouvelles n’est pas un disque pop, rock ou electropoprock, ou tout cela à la fois. Ce serait plutôt une grande valse, celles des étiquettes, n’en déplaise aux codes en vigueur. Un disque taillé non pas pour un public qui aime les mélodies accrocheuses et les refrains enivrants, les arrangements léchés et la simplicité d’une guitare acoustique, ou encore la légèreté d’une ballade gommée par une saturation à peine domptée, mais pour des publics. Avec un grand S. Comme si le résultat final échappait à une criarde évidence. Sans doute parce que Fabrice n’a pas eu le temps, ni l’envie d’ingurgiter trop de paramètres sonores pour mieux garder, le plus longtemps possible, cette fraîcheur de ton qui lui va si bien. Et si les albums de Noir Désir et de Jacques Brel traînent encore sur la table de chevet de l’artiste, celui-ci préfère citer Lars Von Trier pour expliquer son envie de se lancer dans le grand bain de l’écriture. Ou encore parler des proviseurs de lycées qui l’ont remercié gentiment, lui donnant le fuel nécessaire pour aller brûler la pointe de son stylo sur des exercices de style moins pédagogiques. Pas besoin d’avoir une thèse en géo-politique pour lire entre les lignes d’un titre tel que Camarades, véritable pamphlet contre l’injustice et le racisme ou encore Aide Moi et ses banderillles discrètes mais bien placées.
Un mot vient à l’esprit quand finissent les dernières notes du disque : Liberté. De parole, sans pour autant tomber dans une facilité sociale, car la pudeur est là, sincère. Musicale, comme pour prouver définitivement que variété rime avec qualité, sans se soucier si l’on appartient à telle chapelle ou pas. Aux dernières nouvelles, Mauss est toujours libre d’aller où il veut, de nous pondre des ritournelles à légèreté imparable et de nous balancer l’instant d’après une bonne salve de décibels. Il est libre Mauss. Rassurant, non ?



Tracklist:

01. Je recherche
02. L'angle droit
03. Je ne t'aime plus
04. Aux dernières nouvelles
05. Mon ange
06. Camarades
07. Avant de dormir
08. Entre autre
09. Aide moi
10. Entre parenthèses
11. Ne change rien