Waldemar Krynicki, Ama Fleud-Floyd, "Avant l'aube de la psychiatrie"

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Waldemar Krynicki, Ama Fleud-Floyd, "Avant l'aube de la psychiatrie"

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Liberté, liberté, liberté! C'est ce que recherchent toutes les femmes et hommes immatures, Ama! Tous ces gémissements et plaintes sur notre malheur dans la relation, sur la tyrannie et la méchanceté de nos ex-maris, ex-femmes, ce ne sont que des mensonges… Nous voulons pas admettre ouvertement que nous sommes attirés par d'autres hommes, femmes, que nous voulons sortir avec, expérimenter, en d'autres termes nous développer, non pas en secret, mais sous les projecteurs et dans les salons!
Oui, c'est du développement! C’est ce que nous diront des psychologues utiles, puisque nous les rémunérons pour leurs services. De plus, grâce à eux, nous ne nous sentons jamais coupables de quoi que ce soit. Mais nous avons besoin d’un camouflage solide. Nous devons faire semblant de souffrir et de chercher de l'aide pour notre dépression après une relation ratée!!!

Nous vous racontons des contes de fées et vous nous accordez des congés de maladie et même des pensions. Et tout cela n'est qu'un mensonge! Nous, les mentalement immatures, ne souffrons jamais comme ces personnes sensibles!- Elle regarda son mari- Honnêtement, nous méprisons ces personnes sensibles! Et on se méprise nous même quand on doit venir vers vous, psychiatres et psychologues.
Pourquoi devrais-je vous exposer mes faiblesses? Honnêtement, je ne pourrais pas le faire et aucun d’entre nous, les personnes mentalement immatures, ne le fera jamais, je le répète, honnêtement. S’il faut nous faisons semblant, parce que nous avons besoin d’un certificat ou d’une apparence de maladie. Et vous nous fournissez ces apparences, vous payez même très cher pour cette prétention!
Bien plus que ce que gagne un acteur débutant au théâtre! Mais ce dernier il doit se produire chaque soir et mémoriser des centaines de pages de texte. Et grâce à vos certificats de maladie, l'État nous rémunère pour une représentation une fois tous les trois mois ou moins souvent, devant un seul et unique public, qui est vous, docteur. Et nous n'avons même pas besoin d'apprendre le texte. Tout ce qu’on a à faire est de dire: j’ai mauvais sommeil, mauvais appétit, beaucoup d’angoisse et bien sûr je suis triste.
- Ann, tu es tellement excitée!- Son mari a remarqué- Au fait, combien de champagne avons-nous bu jusqu'à présent?
- T’inquiète, Stef, je suis pas ivre. Il faut que Docteur sache comment ça se passe.
- Mais je le savais, Ann- Sava sourit largement- Je sais que beaucoup de gens profitent du système. Mais ce sont des gens pauvres… Sans cette indemnité de maladie, ils n'auraient rien pour vivre. C'est juste assez pour manger, se vêtir et payer l'électricité et l'eau. Je leur délivre un certificat médical, tout en sachant que toute leur vie en dépend.
Ils savent qu'ils ne sont pas malades, qu'ils sont comme ça, impuissants dans la vie, et que cette pension est leur seule chance de mener une vie décente. Les personnes débrouillardes créent des entreprises et se mettent au travail. Il n’y a et il n’y aura jamais de travail pour ceux qui sont incapables de vivre. Alors, comment sont-ils censés vivre?
Un État civilisé doit prendre soin des plus faibles, de ceux qui sont incapables de gagner leur vie par eux-mêmes. Malheureusement, les gens ne naissent pas égaux. Et ceux qui ont moins de ressources, voire sont impuissants dans la vie, doivent également pouvoir vivre. Bien entendu, personne ne divise officiellement les gens de cette manière. Mais c’est bien là l’intention de ceux qui dirigent un pays à visage humain: soutenir les plus faibles.
La psychiatrie est seulement parfois une médecine, mais rarement. Pour la plupart des patients, surtout immature, il s'agit d'un théâtre dans lequel, en jouant le rôle de malades mentaux, ils ont la possibilité de sauver leur face et leur dignité vis-à-vis de leur famille et du reste de la société. Rares sont ici les gens qui ne cherchent aucune justification.