Jean-Pierre Coffe, "Une vie de Coffe"
Publisher: Stock | 2015 | ISBN: 223407567X | French | EPUB | 396 pages | 0.26 Mb
Publisher: Stock | 2015 | ISBN: 223407567X | French | EPUB | 396 pages | 0.26 Mb
Jean-Pierre Coffe : tout le monde le connaît, mais personne ne le connaît vraiment. Il se dévoile ici, à travers ses mémoires, avec une incroyable sincérité. C'est un homme généreux, enthousiaste, infatigable, mais c'est aussi un homme blessé. De son enfance entre un père tué au début de la guerre et une mère qui ne l'aimera jamais assez, de l'aveu d'une paternité malheureuse jusqu'à la consoldation des jardins et des potagers, il n'oublie rien. Il raconte, parfois dans les larmes, parfois dans un rire qui le réconcilie avec l'existence. Derrière le masque du trublion médiatique, apparaît le visage d'un homme souvent seul, mal-aimé, trahi, mais toujours fidèle et prodigue en amitiés. Restaurateur parisien à la mode, meneur de revue, arpenteur du terroir français, militant du goût, ami de Jean Carmet, Jean-Claude Carrière, Miou-Miou, Jean Teulé, ou Michel Drucker, chacune de ses vies renaît l'une après l'autre. Les voici toutes assemblées pour n'en former qu'une. Une vie de Coffe !
Je suis né le 24 mars 1938. Ce jour-là, mon père était absent pour cause de service militaire. Il a ensuite été immédiatement mobilisé, et il est mort le 5 juin 1940, un peu après mon deuxième anniversaire. Il ne m'a pris dans ses bras qu'une fois, à l'occasion d'une permission. Nous ne nous sommes pas connus et donc pas aimés. Deux étrangers ! Mais je considère sa mort comme une chance : il avait imaginé que je lui succéderais dans son salon de coiffure. Coiffeur pour hommes dans une petite ville de province, quel avenir ! Après son départ à l'armée, ma mère, jusque-là secrétaire chez un notaire, a tenu la boutique alors que rien ne l'y prédisposait. Du jour au lendemain, elle a dû quitter son activité pour apprendre à «faire la barbe». Les rasoirs Gillette n'existaient pas encore, le rasoir électrique encore moins. Les hommes allaient se faire raser chez le barbier.
Le salon de coiffure était situé sur la rue principale d'une petite ville de province, dite de garnison, qu'un château a rendue célèbre, sur la route nationale Paris-Strasbourg. Le contournement des villes n'existait pas, leur asphyxie n'avait pas encore été décrétée. On y rentrait ou on en sortait par des faubourgs et, sitôt ceux-ci passés, l'air était pur. On respirait selon les saisons l'odeur de la terre, grasse, noire, lourde, fraîchement retournée par le cheval, guidé par un vieil homme ou une jeune femme tenant d'une main ferme la charrue, l'haleine parfumée des foins juste fauchés. On humait sans crainte d'allergies la poussière étouffante dégagée par la moissonneuse-batteuse. On se régalait du chant des glaneurs qui ramassaient les épis oubliés pour alimenter leurs volailles nourricières. Même pour un petit enfant découvrant la nature, sa main minuscule dans celle, calleuse, de son grand-père, la sensation de bonheur existait. Mon grand-père Victor était maraîcher. Un beau vieillard, les lèvres et le nez minces, les yeux bleus limpides et profonds, de soyeux cheveux d'un blanc immaculé, et une moustache de Gaulois dont il était très fier et qu'il entretenait avec coquetterie. Je me souviens très précisément qu'avant d'arriver sur le marché où il vendait ses légumes, bio sans le savoir, il arrêtait toujours sa carriole tirée par un boulonnais gris pommelé pour sortir de la poche de son gilet une petite boîte qu'il ouvrait soigneusement, avant d'en retirer une brosse aux poils roussis avec laquelle il lustrait sa moustache. Il léchait ses pouces et index pour en tourner les pointes, retirait un vieux peigne en corne, ajustait sa tignasse et allait s'offrir à ses clientes.
Le père de mon père fut mon premier initiateur à la compréhension de la nature. Sa femme, que mes cousins et moi appelions la grosse Nini, ne nous aimait pas, ne nous recevait pas et n'a manifesté à mon égard nulle tendresse. Je n'ai aucun souvenir d'elle, sinon qu'elle nous obligeait à aller ramasser des marrons, qu'elle échaudait, épluchait, râpait pour en faire de gros blocs de savon qui servaient à la lessive de toute la famille.
(…)
Le salon de coiffure était situé sur la rue principale d'une petite ville de province, dite de garnison, qu'un château a rendue célèbre, sur la route nationale Paris-Strasbourg. Le contournement des villes n'existait pas, leur asphyxie n'avait pas encore été décrétée. On y rentrait ou on en sortait par des faubourgs et, sitôt ceux-ci passés, l'air était pur. On respirait selon les saisons l'odeur de la terre, grasse, noire, lourde, fraîchement retournée par le cheval, guidé par un vieil homme ou une jeune femme tenant d'une main ferme la charrue, l'haleine parfumée des foins juste fauchés. On humait sans crainte d'allergies la poussière étouffante dégagée par la moissonneuse-batteuse. On se régalait du chant des glaneurs qui ramassaient les épis oubliés pour alimenter leurs volailles nourricières. Même pour un petit enfant découvrant la nature, sa main minuscule dans celle, calleuse, de son grand-père, la sensation de bonheur existait. Mon grand-père Victor était maraîcher. Un beau vieillard, les lèvres et le nez minces, les yeux bleus limpides et profonds, de soyeux cheveux d'un blanc immaculé, et une moustache de Gaulois dont il était très fier et qu'il entretenait avec coquetterie. Je me souviens très précisément qu'avant d'arriver sur le marché où il vendait ses légumes, bio sans le savoir, il arrêtait toujours sa carriole tirée par un boulonnais gris pommelé pour sortir de la poche de son gilet une petite boîte qu'il ouvrait soigneusement, avant d'en retirer une brosse aux poils roussis avec laquelle il lustrait sa moustache. Il léchait ses pouces et index pour en tourner les pointes, retirait un vieux peigne en corne, ajustait sa tignasse et allait s'offrir à ses clientes.
Le père de mon père fut mon premier initiateur à la compréhension de la nature. Sa femme, que mes cousins et moi appelions la grosse Nini, ne nous aimait pas, ne nous recevait pas et n'a manifesté à mon égard nulle tendresse. Je n'ai aucun souvenir d'elle, sinon qu'elle nous obligeait à aller ramasser des marrons, qu'elle échaudait, épluchait, râpait pour en faire de gros blocs de savon qui servaient à la lessive de toute la famille.
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Il a été comédien, restaurateur vedette aux Halles de Paris et montreur de complaintes à la télévision. Dieu a envoyé Coffe sur Terre pour lutter contre les colorants sur Canal + et France 2. Un Moïse chauve, avec en guise de tables de la loi des recettes de flanc aux oeufs et de tête de veau sauce gribiche…
Il a écrit sur les araignées de Roscoff, le homard d'Audresselles, les fossés plein d'escargots, les vins de soif, le saucisson pur porc qui ne l'est plus, les camélias et les cèpes. Il a parcouru la France et ses marchés, l'Auvergne, ses villes d'eaux et ses golfs miniatures. Voilà donc Coffe qui se raconte. Et, c'est souvent à pleurer de tristesse la vie d'un pupille de la Nation, dont la mère, coiffeuse à Lunéville, fut rasée à la Libération. Il éclaire son enfance lorraine avec une lampe torche. Une vie de jeune adulte monté à Paris, qu'il entrevoit comme une existence bourgeoise, mais qui se fracasse quand le corps de son nouveau-né nage dans le bidet d'une salle de bains, où sa première femme vient d'avorter sous ses yeux…
Jean-Pierre Coffe est un taxidermiste de grand talent. Il a l'art d'empailler ceux qu'il a pleurés. Les pages sur l'acteur Jean Carmet sont merveilleuses. Le moment où les deux hommes boivent comme des éviers dans un clandé de Tours est à se taper les cuisses. Toutefois, Coffe met d'un coup l'index au-dessus du verre, signifiant que point trop n'en faut : «Jean buvait, certes, beaucoup, mais jamais sur les tournages.» La mémoire est ainsi sauve. (Jean-Louis Le Touzet - Libération du 6 mai 2015)
Quand Jean-Pierre Coffe se déboutonne, ça donne une leçon à pas mal de «grantécrivains» de France. Son livre, «Une vie de Coffe» (éd. Stock, sortie le 6 mai), se dévore comme un pain frais après la famine…
Dans un style magnifique, plein d'images, de scènes vivantes, souvent comiques, et d'adjectifs précis, il vous balance trois films à la fois : un drame, une comédie, un western des affaires et du show-business…
Mais ici, tout est vrai. Il a l'art de vous emporter dans ses éblouissements, ses passions, ses fous-rires et ses angoisses. Il a un humour irrésistible, et une grande élégance pour évoquer l'intime… (Catherine Schwaab - Paris-Match, mai 2015)
Dans un livre-confession, Jean-Pierre Coffe passe à table et nous déroule sa vie par le menu…
Jusqu'alors Jean-Pierre Coffe faisait des recettes qu'il mettait dans ses livres. Cette fois c'est le livre lui-même qui risque de faire recette. (Paris-Match, mai 2015)
Il a écrit sur les araignées de Roscoff, le homard d'Audresselles, les fossés plein d'escargots, les vins de soif, le saucisson pur porc qui ne l'est plus, les camélias et les cèpes. Il a parcouru la France et ses marchés, l'Auvergne, ses villes d'eaux et ses golfs miniatures. Voilà donc Coffe qui se raconte. Et, c'est souvent à pleurer de tristesse la vie d'un pupille de la Nation, dont la mère, coiffeuse à Lunéville, fut rasée à la Libération. Il éclaire son enfance lorraine avec une lampe torche. Une vie de jeune adulte monté à Paris, qu'il entrevoit comme une existence bourgeoise, mais qui se fracasse quand le corps de son nouveau-né nage dans le bidet d'une salle de bains, où sa première femme vient d'avorter sous ses yeux…
Jean-Pierre Coffe est un taxidermiste de grand talent. Il a l'art d'empailler ceux qu'il a pleurés. Les pages sur l'acteur Jean Carmet sont merveilleuses. Le moment où les deux hommes boivent comme des éviers dans un clandé de Tours est à se taper les cuisses. Toutefois, Coffe met d'un coup l'index au-dessus du verre, signifiant que point trop n'en faut : «Jean buvait, certes, beaucoup, mais jamais sur les tournages.» La mémoire est ainsi sauve. (Jean-Louis Le Touzet - Libération du 6 mai 2015)
Quand Jean-Pierre Coffe se déboutonne, ça donne une leçon à pas mal de «grantécrivains» de France. Son livre, «Une vie de Coffe» (éd. Stock, sortie le 6 mai), se dévore comme un pain frais après la famine…
Dans un style magnifique, plein d'images, de scènes vivantes, souvent comiques, et d'adjectifs précis, il vous balance trois films à la fois : un drame, une comédie, un western des affaires et du show-business…
Mais ici, tout est vrai. Il a l'art de vous emporter dans ses éblouissements, ses passions, ses fous-rires et ses angoisses. Il a un humour irrésistible, et une grande élégance pour évoquer l'intime… (Catherine Schwaab - Paris-Match, mai 2015)
Dans un livre-confession, Jean-Pierre Coffe passe à table et nous déroule sa vie par le menu…
Jusqu'alors Jean-Pierre Coffe faisait des recettes qu'il mettait dans ses livres. Cette fois c'est le livre lui-même qui risque de faire recette. (Paris-Match, mai 2015)