Chronique du Charles de Gaulle; L'apogée d'un siècle d'aéronautique navale

Ce remarquable ouvrage est d'abord un hommage. Hommage aux pionniers, « ces merveilleux fous volants », hommage à leurs « drôles de machines », hommage à tous les successeurs, hommes et appareils qui, depuis à peine moins d'un siècle, ont peu à peu, chacun et tous ensemble, forgé et personnifié un outil souverain : l'Aéronautique navale. Feuilleter ce livre est une joie permanente. Chaque page porte témoignage. Chacune fait revivre un avion, un ballon, un dirigeable, un hélicoptère, on est surpris qu'ils aient été si nombreux et si diffé­rents. Chaque page est aussi un morceau d'histoire où les dates et les faits se succèdent comme dans une fresque destinée à n'avoir pas de fin. On ne lit pas un livre, on pénètre dans un univers empreint de noblesse et de majesté, un univers où l'on ne triche pas et qui séduit à cause des êtres qui l'ont peuplé. C'est une chanson de geste, la saga d'une immense famille dont il semble qu'aucun membre ne soit oublié et, moins encore que tous les autres, ceux qui ne sont pas revenus. On y découvre ceux du ciel, ceux qui, simples volants au pied de leurs avions, en l'air étaient des hommes. On y devine aussi ceux du sol, marins à terre ou embarqués sans lesquels rien ni personne n'eût pu s'envoler. On y admire enfin la multitude des engins que tous ont eus entre les mains, dont ils faisaient des instruments sublimes et redou­tables, et avec lesquels ils ont participé, de par le monde, à tous les conflits qui ont concerné la France depuis 1914. J'ai un temps fait partie de la maison, un temps sans durée dont le souvenir me fait penser que je n'ai pas quitté la famille. J'y étais bien. Elle était la destinée qui me convenait. Comme beaucoup d'autres, tous sans doute, j'y ai connu parfois des heures difficiles, celles où l'on apprenait la disparition d'un pilote ou d'un équipage - en trente ans j'en ai connu plus de soixante - mais ces heures aussi mon souvenir les a sacralisées. Oui, dans l'aéronavale, j'ai été un homme heureux. Il fallait que cette chronique fût réalisée. Remercions-en les auteurs. Tous les avions, tous les aéronefs, tous les bâtiments ou types de bâtiments susceptibles de les mettre ou de les avoir mis en œuvre y sont illustrés. Tous les acteurs, quelles que soit leur génération, sont là en filigrane. Elle commence en 1803. C'était une promesse. Depuis lors la promesse a été régulièrement entretenue et, s'il fallait d'un mot résumer le destin de l'Aéronautique navale, je dirais : sa pérennité.